Qualification différente = rémunération différente ?
Deux salariés, titulaires de qualifications différentes au moment de leur embauche, mais qui occupent à terme les mêmes fonctions, peuvent-ils être rémunérés différemment ? Voici une question épineuse à laquelle le juge vient d’être confronté…
Une différence de qualification n’est pas suffisante pour justifier, à terme, une différence de rémunération
Un salarié est embauché en qualité d’« assistant journaliste reporter d’images stagiaire », puis est promu en qualité de « journaliste reporter d’images », avant d’être nommé chef de service.
En conflit avec son employeur, il prend acte de la rupture de son contrat de travail et saisit le juge pour demander notamment un rappel de salaire.
Pourquoi ? Parce que pendant près d’un an, il a perçu une rémunération inférieure à celle de l’un de ses collègues, également « journaliste reporter d’images ».
« Et alors ? », s’interroge l’employeur. Pour lui, cette différence de rémunération entre les 2 salariés est parfaitement justifiée, étant donné qu’ils n’avaient pas les mêmes qualifications ni la même expérience professionnelle lors de leur embauche.
Saisi du litige, le juge rappelle qu’une différence de traitement entre salariés ne peut se justifier que par des raisons objectives et pertinentes. C’est le principe d’égalité de traitement.
Or pour lui, la différence de qualification des salariés lors de leur embauche n’est pas une raison objective et pertinente justifiant la disparité de traitement pendant une année.
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mercredi 04 octobre 2023
Personnalité morale d’une société : survit-elle à la dissolution ?
La personnalité morale d’une société est acquise dès l’immatriculation de celle-ci au registre du commerce et des sociétés (RCS). Une fois la dissolution de la société prononcée et sa radiation au RCS effectuée, elle perd, en principe, cet attribut… Y a-t-il des exceptions ?
Dissolution de société et personnalité morale : une exception à connaître
Dans une affaire portée récemment devant le juge, une société acquiert un droit au bail portant sur un local commercial. Quelques années après, elle donne congé et quitte les lieux.
Pour mémoire, le droit au bail est un droit permettant au locataire d’occuper un local. Il peut être cédé soit dans le cadre de la vente du fonds de commerce, soit seul, sans vente du fonds. Lorsque la cession du droit au bail est effectuée, le nouveau locataire remplace le locataire initial pour la durée restant à courir dans le bail.
Ici, plus d’un an après avoir quitté les lieux, la société fait l’objet d’une dissolution amiable.
Convoquée devant le juge par les propriétaires du local commercial, elle est condamnée à payer à ces derniers certaines sommes au titre de loyers et de charges impayés et de frais de remise en état du local.
Par la suite, la société est radiée du registre du commerce et des sociétés (RCS).
En tout état de cause, la condamnation est inacceptable, estime la société, qui décide alors de faire appel…
« Impossible ! », selon les propriétaires : sa dissolution et sa radiation du RCS l’ont rendu légalement inexistante ! En d’autres termes, ayant perdu sa personnalité morale, elle ne peut plus agir en justice.
La personnalité morale représente l’existence d’une société en tant que personne et s’acquiert dès l’immatriculation au RCS : elle lui confère la capacité juridique, qui lui permet de posséder des biens, de passer des contrats ou d’agir en justice.
« Possible ! », selon la société : la personnalité morale d’une société, certes dissoute, subsiste aussi longtemps que ses droits et obligations à caractère social ne sont pas liquidés. Elle doit donc pouvoir faire appel de cette décision !
Un avis que partage le juge : la demande formée à son encontre, notamment en vue d’obtenir des sommes au titre des loyers et charges impayés, révèle bien que les droits et obligations nés du contrat de bail étaient susceptibles de ne pas avoir été intégralement liquidés…
Par conséquent, la personnalité morale de la société subsiste temporairement, en dépit de sa radiation au RCS. Elle peut donc faire appel !
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mercredi 04 octobre 2023
Lanceur d’alerte : et si le salarié n’est pas totalement désintéressé ?
Le statut de « salarié lanceur d’alerte » s’accompagne d’une protection particulière contre le licenciement. Mais qu’en est-il lorsque le salarié n’a pas agi de façon totalement désintéressée ? Bénéficie-t-il toujours de cette protection particulière ? Réponse du juge.
Le salarié lanceur d’alerte peut agir dans son propre intérêt !
Un directeur des opérations, embauché dans une société de sécurité, est licencié pour faute grave après avoir dénoncé, par 2 lettres adressées au président de la société, certaines irrégularités quant à la réglementation applicable aux sociétés de sécurité.
Dans ces lettres, il indiquait aussi vouloir entreprendre des actions auprès des autorités et du Procureur de la République.
Un licenciement discriminatoire, conteste le salarié, qui estime pouvoir bénéficier du statut protecteur des salariés lanceurs d’alerte au titre de sa dénonciation : il n’a fait que relater des faits constitutifs d’un délit dont il a eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions…
« Faux », conteste l’employeur : d’abord, ce salarié, qui a été embauché précisément pour remédier aux irrégularités en question, aurait lui-même participé à l’élaboration de certaines procédures irrégulières dénoncées par la suite !
Ensuite, l’employeur considère qu’il ne peut pas bénéficier du statut protecteur des salariés lanceurs d’alerte puisqu’il n’a pas agi de manière désintéressée : le salarié l’aurait fait chanter en essayant de renégocier le montant de sa rémunération contre son silence, avant de dénoncer les faits face au refus essuyé.
Mais le juge donne raison au salarié, rappelant que le salarié qui relate ou témoigne des faits constitutifs d’un délit dont il aurait eu connaissance dans ses fonctions bénéficie du statut protecteur, notamment contre le licenciement, sans avoir à démontrer qu’il a agi de façon désintéressée.
Ainsi, ce salarié dont la mauvaise foi n’est pas établie ici, peut prétendre à la protection offerte par le statut de salarié lanceur d’alerte et ce, quand bien même il n’aurait pas agi de manière totalement désintéressée. Le licenciement est donc nul.
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mardi 03 octobre 2023
Versement de la participation : attention au temps partiel thérapeutique !
Dans quelle mesure l’employeur peut-il tenir compte des heures non-travaillées par le salarié en temps partiel thérapeutique pour réduire son droit à la prime de participation ? Commet-il alors une discrimination en raison de l’état de santé ? Précision du juge.
Participation : le mi-temps thérapeutique doit être considéré comme du temps de travail effectif !
Pour rappel, la participation est un dispositif mis en place par accord collectif permettant de garantir la redistribution des bénéfices de l’entreprise aux salariés.
Le partage des sommes dues au titre de la participation peut notamment être calculé sur la base des heures de travail réalisées par les salariés, conformément aux dispositions de l’accord instituant ce dispositif.
Dans une récente affaire, après un accident du travail, une salariée reprend son poste dans le cadre d’un temps partiel thérapeutique.
Quelques temps plus tard, elle touche une somme au titre de la participation, qu’elle estime insuffisante…Selon elle en effet, le montant versé ne tient compte que des heures effectivement réalisées dans le cadre du temps partiel (donc du salaire qui y était attaché), ce qui conduit à réduire considérablement l’enveloppe qui lui revient…
Une discrimination fondée sur son état de santé, estime-t-elle, qui la conduit à attaquer son employeur en justice !
Ce dernier se défend : selon les termes de l’accord de participation en vigueur dans l’entreprise, seules les heures de travail effectif (ou assimilées comme telles) doivent être prises en compte pour le calcul des droits à la participation de chacun des salariés.
Or cet accord ne prévoit pas l’assimilation des heures non-travaillées en raison du mi-temps thérapeutique à des heures de travail effectif !
Il est donc en droit de ne prendre en compte que les heures de travail effectivement réalisées…
« Non ! », tranche le juge, qui donne raison à la salariée : aucun salarié ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire en raison de son état de santé.
Se faisant, le juge rappelle qu’indépendamment des termes de l’accord collectif, en cas de temps partiel thérapeutique, l’ensemble de la période concernée doit être assimilée à du temps de travail effectif pour le calcul des droits individuels à la participation.
En définitive et pour éviter tout risque de discrimination salariale, le salaire ou le temps de travail de référence à prendre en compte pour le calcul de la somme revenant au salarié au titre de la participation est celui perçu avant le mi-temps thérapeutique et l’arrêt maladie qui le précède, le cas échéant.
Reste à savoir si cette décision s’appliquerait en matière de calcul des droits à l’intéressement ou encore au mi-temps thérapeutique prescrit à la suite d’une maladie. Affaire à suivre…
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mardi 03 octobre 2023
Le compte professionnel de prévention : pour tous ?
Un député a récemment posé la question au Gouvernement de savoir si les salariés du particulier employeur et les travailleurs titulaires d’un contrat de travail inférieur à un mois pouvaient également bénéficier du compte professionnel de prévention (C2P) ? Réponse…
C2P : le sort des salariés du particulier employeur et des contrats courts
Le compte professionnel de prévention (C2P) est un dispositif permettant d’inciter les employeurs à prévenir l’exposition des salariés à la pénibilité.
Ainsi, il permet au salarié exposé à des facteurs de risques professionnels durant sa carrière (visés par la réglementation) d’obtenir des points qu’il peut ensuite décider d'utiliser en tout ou partie pour financer une formation, réduire sa durée de travail, bénéficier d’un départ anticipé à la retraite ou encore, pour financer un projet de reconversion professionnelle.
Après étude de ce dispositif, un député a relevé le fait que les salariés du particulier employeur, de même que les salariés titulaires d’un contrat de travail d’une durée inférieure à un mois, étaient totalement exclus du dispositif.
Or ces salariés peuvent, eux aussi, être soumis à des conditions de travail pénibles, notamment les intérimaires dont les contrats sont renouvelés successivement.
Il demande donc au Gouvernement ce qu’il compte faire pour pallier cette disparité…
Interrogé, le Gouvernement rappelle que le dispositif du C2P concerne :
- les salariés de droit privé affiliés au régime général ou agricole, ainsi que certains personnels employés par des personnes publiques ;
- et qui sont titulaires d'un contrat de travail dont la durée est au moins égale à un mois, quel que soit la nature du contrat.
Cette « restriction » se justifie, selon lui, par la nécessité d'assurer la traçabilité effective des expositions.
Par conséquent, les salariés du particulier employeur et les salariés titulaires d’un contrat de travail d’une durée inférieure à un mois ne peuvent pas bénéficier du C2P.
Néanmoins, ils peuvent bénéficier d’autres dispositifs, notamment :
- des mesures de prévention déployées par l’Assurance maladie à travers des outils et des guides, pour les salariés dont les contrats de travail sont inférieurs à un mois ;
- d’une plateforme digitale, regroupant des ressources sur la prévention des risques professionnels, qui s’adresse à tous les acteurs du secteur des services à la personne, y compris les particuliers-employeurs ;
- etc.
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mardi 03 octobre 2023
Examen génétique : se passer du consentement ?
Depuis 2021, il est prévu que sous certaines conditions, un médecin puisse réaliser des examens génétiques sur une personne qui ne peut pas donner son consentement, afin d’anticiper des affections pouvant toucher sa famille. Cependant les conditions de réalisation de ces examens restaient à préciser. C’est chose faite…
Examen génétique : protéger les proches du patient
En 2021, la loi dite « de bioéthique », ouvrait la voie à un élargissement des examens génétiques réalisés en vue de détecter de possibles affections génétiques pouvant toucher plusieurs membres d’une même famille.
Cet élargissement concerne tout particulièrement le cas des personnes décédées ou n’ayant plus la capacité de donner leur consentement pour la réalisation de tels examens.
Il est ainsi prévu que, si aucune opposition n’a été formulée au préalable, le médecin peut procéder à des examens génétiques sur un patient qui ne pourrait plus y consentir afin de détecter des maladies qui seraient susceptibles d’atteindre gravement des membres de sa famille et pour lesquelles des mesures de prévention seraient nécessaires.
Schématiquement, si un médecin suppose l’existence d’une telle affection, il contacte les membres de la famille potentiellement concernés dont il a les coordonnées pour les informer de cette possibilité d’examen. Si au moins l’un des membres de la famille donne son accord, le médecin peut procéder à l’examen sur le patient hors d’état de donner son consentement.
Les données qui en résultent sont accessibles, sur demande, à toutes les personnes potentiellement concernées, même celles n’ayant pas donné leur accord pour la réalisation de l’examen.
Une fois ce régime mis en place, restait toujours à déterminer ce que sont les « affections graves » justifiant de telles démarches.
Un nouveau texte a donc été publié, détaillant en annexes les conditions à retenir pour savoir si une affection est suffisamment grave, à savoir :
- un risque de décès prématuré ;
- un risque de handicap sévère, en particulier le risque d’impossibilité d’autonomie à l’âge adulte.
Des précisions sont également apportées concernant :
- les critères à prendre en compte par les praticiens pour apprécier cette gravité au regard de l’état des connaissances médicales actuelles ;
- l’intérêt de la démarche pour les membres de la famille, ainsi que les mesures de prévention qui pourraient leur être proposées.
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mardi 03 octobre 2023